11 novembre 2014

Curation et culture populaire




Sommes-nous tous des curateurs ?

J'ai amplement traité du phénomène de la curation (ici, ici, ici et encore dernièrement ici).

Voilà que le critique d'art, rédacteur et enseignant en littérature torontois David Balzer publie un livre sur le sujet. Une de ses thèses propose que nous sommes tous engagés, dans une forme ou une autre, par la curation; un peu à la manière de Monsieur Jourdain qui fait de la prose sans le savoir...

Curationism: How Curating Took Over the Art World and Everything Else offre d'abondants exemples de notre époque dans laquelle l'acte de sélectionner, de trier, de remixer, voire de créer des informations, des objets et pourquoi pas, même des denrées comestibles devient l'apanage de tous : de l'artiste en sandwich de chez Subway au styliste mode ou décor, en passant par l'animateur de communautés ou encore le premier quidam qui réorganise sa page Facebook...

Le Globe and Mail présente quelques extraits du livre avec le titre The curated Age.

Cependant, comme l'écrit le critique Dave Hickey, le livre de Balzer est " A good read, if you don't mind reading things that you don't want to know."

Blague à part, ce qu'on retient c'est que la curation permet à beaucoup de monde de se sentir créatif, pourvu - en terme d'informations- qu'il ne s'agisse pas seulement d'agrégation sotte (j'en ai beaucoup parlé ailleurs de cela...).

La curation (ou curationnisme) mènera-t-elle aussi à la fin de ce qu'on appelle l'avant-garde ? C'est ce que prétend Balzer (sourire en coin)...

Par ailleurs, on retrouve dans le Globe (à côté de l'article en question) un autre article intitulé The rise of the curator in popular culture, écrit par Alexandra Molotkow.


On y parle plus intellectuellement de l'obsolescence du goût (du bon goût ?) et de la différence entre le goût et la sensibilité, des concepts (mouvements ou attitudes) propres au normcore et au poptimism.  


Je crois qu'il s'agit de tendances plus passagères que la curation même, en cette ère où le fait de vouloir se distinguer- voire l'attrait du narcissisme - par quel que moyen que ce soit- demeure une force humaine quasi irrésistible. 

D'autre part, si tout le monde devient curateur, tous et personne ne sont plus curateurs et la curation ne veut plus rien dire au point où il n'y a plus de sens à trouver ni à comprendre...

Molotkow écrit : " What happens when there are no more arbiters of taste, no rank of persons who, through instinct, experience, and training, know best ?

Est-ce à dire la mort imminente du critique, du guide... "[...] then, with no one to guide us to and through difficult work, culture will become culture-porn and we'll all just be scratching our asses and laughing at memes."


Pour en apprendre davantage:


Curationism Q & A
http://www.chbooks.com/reviews/david-balzer-did-curationism-qa-blog-bookstore

Entrevue avec David Balzer sur CBC (une des dernières de Jian Ghomeshi/Q)
http://www.cbc.ca/q/blog/2014/10/14/lost-meaning-of-curation/



Merci de votre lecture !

Patrice Leroux

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